Sealand : L’histoire de cette micronation de hackers

La Principauté de Sealand existe depuis près de 50 ans à proximité des côtes britanniques. Cette micronation jamais reconnue par une autre « vraie » nation a une réelle histoire pleine de rebondissements.

Le territoire de la principauté de Sealand est une ancienne plate-forme militaire ayant servi pendant la Seconde Guerre mondiale : Fort Roughs. Elle se trouve à 10 km des côtes de Suffolk, en Angleterre. Après la guerre, située dans les eaux internationales, la plateforme désertée n’était soumise à aucune législation et était terra nullus.

Cet endroit est occupé depuis 1967 par les membres de la famille de Prince Roy Bates et ses sujets. En effet, le 25 décembre 1966, Roy Bates, ancien major de l’armée britannique et vétéran de la Seconde Guerre mondiale, arrive avec son bateau de pêche accompagné de quelques amis et prend possession de la plateforme. La Principauté de Sealand est proclamée le 2 septembre 1967, et la micronation se dote d’une monnaie (la Sealand dollar), d’un drapeau, d’une devise (« E Mare Libertas » — « De la mer, la liberté »), d’un hymne national, de timbres-poste, d’un blason et d’une Constitution aux règles libertaires et adopte l’anglais comme langue officielle.

Quelque temps plus tard, des accrochages ont lieu entre des unités de marines et Roy Michael Bates, qui sera traduit en justice pour avoir fait tirer des tirs de sommation dans leur direction. Malgré cela, la Principauté de Sealand est maintenue, car la Cour britannique admet que la plateforme Roughs se localise dans les eaux internationales, donc hors de sa juridiction.

En 1978, un « coup d’État » est perpétré sur la plateforme : le Premier ministre de Sealand, le professeur Alexander G. Achenbach ainsi que plusieurs Allemands et Néerlandais dirigés par un certain Paul Trévisan, prennent possession de Fort Roughs. Libéré aux Pays-Bas, le Prince Roy Bates fait appel à l’armée afin de récupérer la plateforme.

« Descendre d’un hélicoptère, suspendu à une corde, 30 m au-dessus de la mer et faire face à des terroristes : je n’ai plus jamais ressenti une telle montée d’adrénaline » déclarait le prince Roy Bates.

La situation aujourd’hui est ambiguë. Les eaux territoriales britanniques sont aujourd’hui à 12 miles des côtes, incluant la plateforme de Sealand. La principauté a alors évoqué ses propres 12 miles marins, mais la plateforme fait aujourd’hui partie du comté anglais de l’Essex. La principauté de Sealand est toutefois tolérée et le Royaume-Uni qui refuse à employer la force.

Carte de localisation du Sealand, avant l’extension des eaux britanniques / Chris 73

Depuis les années 2000, la principauté du Sealand est suspectée d’héberger des serveurs d’experts autodidactes en cryptographie, recherchant une protection juridique, ou plutôt profiter du vide juridique qui entoure le Sealand. Ryan Lackey, le fondateur d’HavenCo, une société d’hébergement de fichiers finalement disparue en 2008, promettait à ses clients un hébergement de leurs données dans l’anonymat le plus complet selon les lois libertaires sealandaises.

Le 23 juin 2006, la plateforme est ravagée par un feu. Le Sealand fonde alors un gouvernement en exil et quitte Fort Roughs en 2007. Au même moment, la presse relaye la vente de la plateforme pour dix millions de livres sterling pour une surface de 550 m2 habitables, soit un prix de 27 000 euros le m². Mais le prince, désirera-t-il garder un œil sur la plateforme ?

The Pirate Bay, le système de serveurs peer to peer, avait alors lancé l’opération BuySealand.com afin de récolter 2 000 000 de dollars dans le but d’acquérir la plateforme. Il se trouve que le prince Roy refusa de vendre Fort Roughs à The Pirate Bay, qui selon lui est un système « violant les lois sur le copyright ».

À ce propos, voici une interview (en anglais) avec le prince du Sealand :

Sources : Le Temps — Libération — 7 sur 7

– Illustration principale : Ryan Lackey