Stoptober, un mois pour arrêter de fumer : les raisons d’un succès 

Quatre semaines sans tabac, quitte à utiliser des substituts. C’est le défi lancé au mois d’octobre aux fumeurs britanniques. Stoptober, une campagne de prévention originale et positive, qui existe depuis quatre ans et qui porte ses fruits. Près de 10% des fumeurs anglais jouent le jeu, et après un mois d’abstinence tabagique, les chances d’arrêt longue-durée s’avèrent cinq fois supérieures à la moyenne. Un succès qui s’explique par l’unité des acteurs de santé publique et par une nouvelle approche déculpabilisante. 

Stoptober, c’est une success-story à la sauce anglaise. Depuis cinq ans, l’ensemble des professionnels de la lutte contre le tabac du Royaume-Uni se coordonnent au mois d’octobre autour d’une opération de mobilisation, de motivation et d’encadrement des fumeurs désireux de décrocher. L’idée ? Proposer un objectif réaliste de quatre semaines sans fumer, mettre le paquet en termes de soutien… et démontrer que la vie sans tabac c’est possible.

À l’ère des réseaux sociaux et des micro-mobilisations communautaires, la formule fait mouche outre-manche. Chaque année, des centaines de milliers de personnes (environ 10% des fumeurs de Grande-Bretagne) acceptent de relever le défi. Le tout avec le soutien de leur famille, amis, collègues. Un défi parfois même relevé à plusieurs, pour lutter en équipe contre les tentations de rechute. Et quasiment toujours partagé sur Facebook et Twitter.

Contrairement aux campagnes traditionnelles, souvent perçues comme négatives et stigmatisantes par les fumeurs, ces derniers sont acteurs du changement au cours de ces quatre semaines. Surtout, depuis cette année, les acteurs de la santé publique ont choisi de sortir du discours moralisateur (et irréaliste pour beaucoup de fumeurs) consistant à ne promouvoir que l’arrêt total, sinon rien. Un peu comme les politiques de lutte contre le SIDA dans certains lycées américains, basées sur le seul enseignement de l’abstinence, certes efficace dans l’absolu, mais inadaptée à des ados.

A la place, une approche de réduction des risques (dite de « harm reduction ») qui consiste à ne pas chercher l’idéal (l’arrêt de toute substance nocive), mais plutôt un objectif atteignable et qui procure déjà des bénéfices santé importants. C’est pourquoi la campagne Stoptober promeut dès cette année les alternatives à la cigarette qui contiennent certes de la nicotine (qui augmente notamment la tension) mais pas de gaz de combustions (responsables de l’essentiel des morts du tabac par cancer).

Parmi ces alternatives, la e-cigarette est à l’honneur depuis la publication d’études démontrant que l’absence de fumée la rend 95% moins dangereuse que la cigarette traditionnelle. A ses côtés, les professionnels de l’accompagnement au sevrage peuvent aussi continuer à utiliser les produits « classiques » (gommes à mâcher, patchs…) ou plus innovants (dispositifs électroniques de tabac à chauffer sans combustion, dits « cigarette sans fumée »).

Dans ce contexte, l’ensemble des instances sanitaires britanniques se mobilise pour accompagner les participants, mais aussi les associations de lutte contre le tabac qui ont toutes apporté leur soutien à cette nouvelle formule. Les médecins traitants et la NHS (sécurité sociale anglaise) proposent des consultations gratuites sur la tabagie. Le gouvernement a créé une application et une newsletter d’accompagnement. Des patchs, des pastilles à la nicotine, et même des cigarettes électroniques, sont distribués gratuitement tout au long du défi.

Le Stoptober crée incontestablement le buzz tous les mois d’octobre, mais quid du reste de l’année ? Selon les chiffres mis en avant par le gouvernement britannique, les participants ont cinq fois plus de chances de parvenir à se débarrasser durablement du tabac que s’ils arrêtaient seuls et non accompagnés. Les Anglais fumaient autant que les Français il y a vingt ans, mais ils sont désormais deux fois moins nombreux à être accros à la nicotine. De quoi remettre en cause l’approche française du tout punitif ?