Le budget de l’armée, un silencieux sacrifice qui doit prendre fin

Jamais ils ne se plaignent, et pourtant il y a de quoi ! Depuis des années, ils se sacrifient pour les autres en restant silencieux. L’armée française subit chaque année un peu plus les réductions budgétaires du gouvernement. Pour le général Pierre de Villiers, Chef d’État-Major des Armées, il est l’heure de parler. Le 7 octobre dernier, il s’est adressé avec vigueur aux députés : « il n’y a pas de gras dans nos armées. On attaque le muscle, alors que la situation sécuritaire se dégrade ! C’est mon devoir de vous le dire ».

Alors que l’armée française est actuellement au sol sur deux théâtres d’opérations militaires dans le monde (au Mali et en Centrafrique), qu’elle apporte son soutien à la coalition internationale face aux forces terroristes de l’État Islamique en Irak et au Levant et qu’il y a un renforcement du système Vigipirate sur le territoire national, notre armée est obligée d’être en permanence sur le qui-vive. Mais pour se permettre une telle mobilisation militaire, il faut des moyens financiers… ce que l’armée a de plus en plus de difficultés à trouver : « Que les choses soient dites, il n’y a plus de gras dans nos armées, si toutefois il y en a eu. J’invite ceux qui n’en sont pas convaincus à aller voir les conditions de travail et de vie de nos soldats » martèle le Chef d’État-Major des Armées dans un poignant discours aux parlementaires.

Il l’affirme haut et fort, l’armée française est « belle » par l’engagement des soldats qui la composent : « Le comportement opérationnel de nos armées est le révélateur des qualités de nos jeunes militaires. Elle est la preuve de l’endurance et du dévouement à notre pays de nos jeunes engagés. Nous avons une belle jeunesse. Elle est généreuse. Elle mérite le respect de la Nation, sa considération et son soutien. Très concrètement, nos armées transforment parfois des jeunes, aux parcours chaotiques, ou dans la difficulté, en véritables héros. » Mais la survie de cette armée dépend des moyens que le gouvernement sera prêt à mettre. Il est facile de donner des ordres et de mobiliser des soldats à l’autre bout du monde quand on est bien confortablement assis dans un fauteuil en cuir… mais les hommes sur le terrain font leur maximum… avec le minimum, et cela au prix du désespoir. Le Général de Villiers demande donc de voter un budget pour l’armée qui permette « d’assurer des conditions de vie et de travail décentes. »

Dans la presse, on ne parle que rarement de la situation de nos armées sur le terrain. Pourquoi ne parle-t-on plus du Mali ? Pourquoi ne parle-t-on plus du Centrafrique ? Les caméras sont braquées en direction du Moyen-Orient et l’opinion publique penche peu à peu pour une intervention de l’armée française. En est-elle seulement capable alors que son budget ne cesse d’être amputé ?

C’est pourquoi le Général de Villiers conclut ainsi son message aux députés : « Les hommes et les femmes de nos armées, nos jeunes, risquent leurs vies au nom de la France, en notre nom à tous. En retour, nous avons un contrat moral avec eux. Ils ne comprendraient pas, comme d’ailleurs nos concitoyens, que la LPM [ndlr : Loi de Programmation Militaire, ce que l’on peut assimiler au budget de l’armée] puisse être amputée de quelconque manière, dans le contexte actuel en France et dans le monde. »

Source : Discours original du Général de Villiers aux députés le 7 octobre 2014