Aux États-Unis, une Ă©tude a montrĂ© que les pourboires favorisaient le harcèlement sexuel des serveuses. Ces travaux Ă©voquent aussi l’obligation de « servir avec le sourire », une attitude de rigueur dans les Ă©tablissements concernĂ©s. L’Ă©tude en question est la première Ă Ă©tablir un lien empirique entre les pourboires et le harcèlement sexuel.
Entre dépendance et obligation
En mars 2021, un rapport de l’UniversitĂ© de Californie Ă Berkeley (États-Unis) rĂ©vĂ©lait que plus de 70 % des employĂ©es de restaurants amĂ©ricains ont subi un harcèlement sexuel. De plus, la moitiĂ© de ces femmes seraient victimes de ce genre de comportement au moins une fois par semaine. D’ailleurs, les plaintes pour harcèlement que reçoit l’Equal Employment Opportunity Commission (EEOC) (agissant pour l’Ă©galitĂ© des chances dans l’emploi) proviennent le plus souvent du secteur de la restauration.
Des chercheurs de l’UniversitĂ© d’État de Pennsylvanie et de l’UniversitĂ© de Notre Dame (États-Unis) ainsi que de l’EM Lyon (France) parlent d’une « culture du harcèlement sexuel » dans cette industrie. Dans leur Ă©tude publiĂ©e le 10 juin 2021 dans le Journal of Applied Psychology, ils indiquent avoir identifiĂ© les causes du problème, Ă savoir une dĂ©pendance aux pourboires dans le but d’obtenir un salaire dĂ©cent, mais aussi l’obligation de servir en adoptant une attitude amicale et agrĂ©able avec la clientèle.
Un rapport de force conduisant au harcèlement
Ces travaux sont inĂ©dits dans la mesure oĂą il s’agit des premières recherches Ă Ă©tablir un lien empirique entre les pourboires et le harcèlement sexuel. Selon Timothy Kundro, principal auteur de l’Ă©tude, la recherche, mais aussi les mĂ©dias ont pratiquement toujours focalisĂ© leur attention sur le harcèlement entre les membres d’une mĂŞme entreprise. On ne relate en revanche jamais le harcèlement subi par les employĂ©s de la part de personnes extĂ©rieures telles que des clients.
L’Ă©tude publiĂ©e en juin 2021 est en deux parties. La première concerne 92 employĂ©es Ă temps plein, interrogĂ©es Ă propos de leurs revenus, les obligations d’adopter une certaine attitude au travail ainsi que la frĂ©quence du harcèlement sexuel. Ensuite, les chercheurs ont intĂ©grĂ© 200 hommes dont la mission Ă©tait de participer Ă une expĂ©rience en ligne. Les volontaires devaient jouer le rĂ´le du client tandis que les chercheurs ajustaient certaines variables telles que la dĂ©pendance aux pourboires ou encore l’expression faciale des serveuses.
Selon les rĂ©sultats, la dĂ©pendance aux pourboires et l’obligation d’être aimable sont une source d’augmentation du risque de harcèlement sexuel. Or, si ces deux facteurs sont courants et peuvent paraĂ®tre insignifiants, ils peuvent gĂ©nĂ©rer un rapport de force conduisant au harcèlement. Pour ces scientifiques, les entreprises et leurs gĂ©rants devraient donc repenser leur modèle de compensation financière Ă destination des employĂ©es ainsi que leurs exigences en ce qui concerne le service aux clients.