Face à la souffrance des salariés, les entreprises en première ligne

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Avec le retour progressif au travail en présentiel, les initiatives se multiplient pour lutter contre les troubles psychosociaux, exacerbés par la crise du Covid. A l’amorce de la saison estivale, les chefs d’entreprise ont le moral au beau fixe. Les réouvertures se multiplient. La consommation reprend.

Deux fois plus de dépressions sévères

Grâce à la vaccination, la crise sanitaire pourrait bientôt n’être quun mauvais souvenir. Pour peu qu’elles ne fassent pas partie des secteurs les plus touchés, l’activité des entreprises promet de repartir de plus belle. Un indicateur comme un autre de cette vague d’espoir : la dernière grande consultation des entrepreneurs (GCE) réalisée par OpinionWay pour CCI France, La Tribune et LCI, voit l’indice mesurant l’optimisme des chefs d’entreprise passer de 73 à 82 entre avril et mai 2021.

Seule ombre au tableau : les séquelles psychologiques laissées par plus d’un an de crise. 46% des entrepreneurs interrogés avouent que la crise a eu un impact négatif sur leur santé mentale et/ou psychologique. Près de trois sur dix disent avoir subi des répercussions négatives sur leur santé physique. Nul doute que ces difficultés éprouvées ont rendu les patrons attentifs à l’impact de la crise chez leurs salariés. Les chiffres issus des différentes enquêtes sont, à ce titre, inquiétants. On compte cette année deux fois plus de dépressions sévères qu’en 2020. Près d’un salarié sur deux serait actuellement en détresse psychologique. Comme après un tsunami, la mer s’est retirée en laissant sur la plage des travailleurs assommés, essorés, déboussolés.

Un traitement inégal selon la taille des entreprises

En plus de l’angoisse liée au risque de maladie, c’est le passage brutal au télétravail qui a laissé le plus de traces. Tel est le constat dressé par le journal Le Monde, qui a enquêté sur l’explosion des situations de mal-être dans les PME. Passés du jour au lendemain d’une ambiance relativement conviviale à un travail solitaire devant leur ordinateur, les collaborateurs de ces entreprises ont été soumis à une longue période de stress qui dure encore aujourd’hui.

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Face à un problème qui n’en épargne aucune, les entreprises ne sont pas toutes logées à la même enseigne. Par manque de temps et de culture dédiée, la plupart des PME sont désarmées face à ces troubles psychosociaux. «Si une structure RH existe, témoigne un responsable syndical, elle sera surtout concentrée sur les questions administratives ou le recrutement». Pas sur la santé psychique du personnel.

Un problème que n’ont pas les grandes entreprises, dotées de ressources humaines et financières qui leur permettent de prendre à leur charge la prévention des troubles nés de la crise, ou aggravés par elle. Ainsi, le groupe LVMH s’est-il doté d’un fonds de 30 millions d’euros pour permettre à ses 150 000 salariés dans le monde de bénéficier d’un accompagnement personnalisé s’ils en expriment le besoin. Lignes d’écoutes locales anonymes accessibles 24h/24 et 7j/7, suivi psychologique, aide financière ponctuelle en cas de graves difficultés : avec le LVMH Heart Fund, le géant du luxe ne lésine pas face à un problème identifié comme un frein majeur à une reprise sereine.

S’attaquer à des problèmes structurels 

A côté de ces mesures d’urgence, certaines entreprises semblent profiter du retour progressif à la normale pour sattaquer à des problèmes structurels, identifiés de longue date, qui polluent le quotidien des salariés. C’est le cas de Michelin, qui a annoncé en avril dernier vouloir se débarrasser de ses managers « toxiques ». La multiplication, pendant le confinement, des cas de harcèlement et de burn out parmi les cadres a forcé la direction du groupe à s’attaquer à un problème récurrent, qui menaçait l’image de l’entreprise, en plus de nuire à sa performance.

Dans un autre registre, on apprenait récemment qu’une société montpelliéraine avait décidé d’instaurer un congé menstruel au bénéfice de ses salariées. En cas de règles douloureuses, celles-ci sont autorisées à rentrer chez elles une fois par mois sans justification médicale.

Quoi qu’il en soit, cette décision, comme les autres mesures évoquées plus haut, témoigne d’une préoccupation pour le bien-être des collaborateurs que la seule crise du Covid ne saurait justifier. Avec l’atténuation progressive de l’activité à distance, et la nécessité de refaire du lieu de travail un environnement attractif, les initiatives de ce genre pourraient bien se multiplier à l’avenir. Et si le monde d’après se caractérisait par une attention accrue à la qualité de vie au travail ?