Les industriels ne veulent pas du codage en 5 couleurs, nous si !

Marisol Touraine, la ministre des Affaires sociales et de la Santé a changé d’avis sur l’application de la Loi Santé adoptée en décembre 2015. L’hésitation porte sur le nouveau type d’étiquetage nutritionnel sur les emballages alimentaires à mettre en place. Selon Cash Investigation, la pression du lobby agroalimentaire serait à l’origine de ce recul, l’émission met d’ailleurs en relief la puissance de ces lobbys dont un grand nombre de parlementaires suivent les recommandations.

La journaliste de France 2 Elise Lucet est allée rencontrer Marisol Touraine afin de lui demander les raisons de ce changement d’avis, qui a conduit au lancement d’une expérimentation grandeur nature relative aux solutions d’étiquetage nutritionnel disponibles pour l’application de la loi. La ministre des Affaires sociales et de la Santé était pourtant contre ces tests demandés par l’industrie agroalimentaire – probablement pour gagner du temps, et plutôt favorable au logo cinq couleurs Nutriscore (ou 5-C), mis au point par le professeur Serge Hercberg, spécialiste de la nutrition à Paris.

Détails du Nutriscore (Crédit image : Simplifions l’étiquetage)

Lorsqu’est posée la question de savoir si ce changement d’avis est le fait d’une pression du lobby agroalimentaire, la ministre répond : « Non, pas du tout. Moi, ce que je veux, c’est qu’il y ait l’étiquetage le plus efficace possible sur les produits alimentaires. » Un argument qui est loin d’avoir convaincu tout le monde.

200 000 internautes demandent l’application du logo 5 couleurs

Une pétition actuellement signée par 200 000 personnes a été lancée via la plateforme Change.org, réclamant à la ministre l’application du logo cinq couleurs, élaboré à partir d’un « score nutritionnel », une note sur le produit allant de la lettre A (en vert foncé) à E (en rouge). Jugé plus équitable pour le consommateur (et plus informatif), ce système est désiré par les citoyens, tandis que le Haut Conseil de la santé publique avait publié un avis positif en août 2015.

Code couleur du Nutriscore (Crédit image : Simplifions l’étiquetage)

Cependant, le changement d’avis de la ministre remet en course l’autre système, jugé « plus orienté » : le SENS, mis au point par le géant français de la grande distribution, Carrefour. Ce système est naturellement plébiscité par les industriels et les distributeurs de l’agroalimentaire. Le logo qui lui est associé, le Nutri-repère, désigne la fréquence de consommation souhaitable en prenant en compte la teneur en nutriments du produit. Ce dernier, censé déterminer si l’on peut (ou doit) consommer tel ou tel produit « souvent », « très souvent » ou « régulièrement en petites quantités », a été jugé « à peine moins complexe à comprendre que l’existant, et n’apportant significativement rien de plus » comme le dit la pétition.

« Le financement de l’expérimentation est public. Il est donc indépendant. Tout cela va être sous le contrôle des autorités sanitaires et de la concurrence. C’est la CNAM qui finance [Ndlr : Laboratoire des industries agroalimentaires]. C’est une annonce que je vous fais, car personne ne l’a dit. Je ne tranche pas et j’attends… » déclare Marisol Touraine.

Voici un extrait de l’émission Cash Investigation intitulée Industrie agroalimentaire : business contre santé :

Sources : France TV Info – Mediapart