Le témoignage poignant de Lilian Lepère, caché durant 8 heures lors de la prise d’otage de l’imprimerie

Il s’appelle Lilian Lepère et il a vécu l’Enfer. Employé de l’imprimerie de Dammartin en Goële où étaient retranchés les frères Kouachi, il est resté caché durant plus de huit heures sous un évier. Quelques jours après, il revient avec émotion sur ces longues heures durant lesquelles le moindre mouvement aurait pu lui être fatal. Poignant.

Lilian Lepère a vécu un cauchemar, huit heures qui lui auront semblé durer une éternité. Il est employé à l’imprimerie où les frères Kouachi se sont retranchés vendredi dernier. Resté caché sous un évier durant de longues heures, il doit probablement la vie à son patron, Michel Catalano, devenu son héros. Lilian Lepère apparaît d’ailleurs apaisé, reposé sur le plateau du 20 heures de France 2 du 12 janvier. Mais une fois le témoignage de son patron diffusé, c’est la gorge nouée et la voix tremblante qu’il entame son récit. Un récit intense.

C’est Michel Catalano, son patron, qui a vu par la vitre les frères Kouachi lourdement armés se diriger vers son entreprise. Ayant très rapidement compris la situation, il a immédiatement dit à Lilian Lepère d’aller se cacher. « Sachant qu’on ne pouvait pas se cacher à deux, j’ai fait demi-tour et je suis allé vers eux. Je pensais que les choses étaient cuites, finies », déclare Michel dans un premier témoignage. Mais les deux hommes ne se sont pas montré agressifs, le patron leur a même fait un café et soigné la plaie de l’un d’eux.

Pendant ce temps, Lilian a le temps de se cacher. « Je veux lui dire merci, car c’est le fait de leur avoir proposé un café à l’opposé de là où j’étais qui m’a donné les secondes nécessaires pour que je puisse me cacher. S’ils m’avaient découvert, si nous avions été deux otages au lieu d’un, peut-être que les choses auraient été différentes, qu’ils nous auraient gardés jusqu’à la fin. C’est grâce à lui si je suis là aujourd’hui. Je ne le remercierai jamais assez » déclare Lilian.

Sa cachette ? Le placard, sous l’évier. Un simple meuble à deux portes battantes, mesurant environ 70 cm x 90cm x 50cm. En position fœtus durant de longues heures dans ce placard, le moindre mouvement aurait pu changer la tournure des événements. « Si on fait un mouvement, d’un côté ça ouvre la porte et de l’autre ça tape dans le mur. Pendant 8 h 30 ».

Le récit de Lilian est extrêmement précis. Il prend aux tripes lorsqu’il raconte avoir entendu l’un des frères Kouachi ouvrir le placard situé juste à côté du sien, ou lorsque ce même frère se désaltère en buvant au robinet, juste au-dessus de lui. « Il revient vers mon meuble et boit au robinet, juste au-dessus de moi. J’entends l’eau qui coule au-dessus de ma tête, je vois son ombre à travers l’interstice de la porte du meuble et je sens l’eau qui coule, car le siphon fuit un petit peu. Un moment complètement surréaliste, qu’on ne voit que dans les films. » Un témoignage long et détaillé :

J’ai joué au Loto!

Conscient de l’extrême fragilité de la situation qu’il a vécu quelques jours plus tôt, il sait la chance qu’il a eue ce jour-là. « Je me sens chanceux, surtout. D’ailleurs j’ai joué au Loto ce soir ». Avant de rendre un bel hommage aux victimes, celles qui n’ont pas eu sa chance. « Moi-même et ma famille, on est conscients de ce qui s’est passé ailleurs, à Vincennes et à Charlie Hebdo. On est solidaires de ces familles-là qui n’ont pas eu notre chance. On a eu des hommes de courage, les hommes du GIGN qui sont les héros de cette journée, parce que c’est eux qui sont sous le feu. »

Source : francetvinfo