Les Jarawas, l’un des derniers peuples à vivre en autarcie sont menacés de disparition

Avez vous déjà entendu parler des Jarawas ? Peut-être pas, car ils ne sont que quelques centaines vivant sur un archipel paradisiaque isolé de l’océan Indien. Cet archipel, administré par l’Inde, voit les Jarawas exposés à une véritable extinction.

« Les Jarawas des îles Andaman jouissent des richesses de la nature. Leurs forêts leur apportent bien plus que ce dont ils ont besoin » explique Anvita Abbi, professeur de linguistique à l’université de Jawaharlal Nehru.

Les Jarawas sont un petit peuple de chasseurs-cueilleurs semi-nomades vivant en autarcie depuis des dizaines de milliers d’années, préservés de tout de par leur situation géographique particulière. Actuellement au nombre de 400 environ, ils habitent sur les Îles Andaman (4120 km2), administrativement rattachées au territoire indien des îles Andaman-et-Nicobar situé à 200 km au sud de la Birmanie.

Localisation des îles Adaman

Ethniquement, les Jarawas sont proches des Bochimans du désert du Kalahari d’Afrique Australe. On les considère donc comme des pygmées, avec une physionomie bien distincte des peuples asiatiques qui les entourent. Ils vivent en parfaite autonomie, par groupes d’environ 50 individus dans des habitations nommées « chaddhas ». Ils chassent, pêchent et cueillent la nourriture dont ils ont besoin et rien de plus. Leur connaissance optimale de leur environnement fait que les Jarawas représentent une richesse culturelle inestimable.

Très peu de personnes ont pu pénétrer dans leur intimité afin d’étudier leur culture et leur langue, faisant des Jarawas un peuple très méconnu. La preuve en est faite par les clichés véhiculés en Inde : les Jarawas sont des sauvages cannibales. En réalité, il s’agit d’un peuple vivant en paix, qui s’est en revanche toujours montré hostile à notre monde, et aujourd’hui plus que jamais :

« Votre monde est mauvais pour nous, on ne l’aime pas. Il y a trop de gens, trop de bruit, pas de paix, on n’aime pas ça. On ne veut plus avoir d’interaction et être trop proche de votre monde. On veut rester comme on est. Ici, c’est chez nous, c’est là que l’on veut vivre » explique Abé, un chasseur Jarawa à Alexandre Dereims et Claire Beilvert, un journaliste et une photographe français.

Depuis leur premier contact avec les Indiens en 1998, des milliers de colons du continent sont venus sur les îles Andaman et ont surpassé en nombre les locaux. De multiples dérives sont alors apparues puisque la zone a été développée pour le tourisme, car  l’archipel dispose de plages magnifiques.

Les Jarawas ont été exposés à des maladies encore inconnues pour eux et leur mode de vie a changé, puisque ces derniers ont commencé à porter des vêtements et à utiliser des objets offerts pas des gardes forestiers et autres curieux. Émanant des autorités indiennes, divers projets de réinstallation des Jarawas, puis une promesse de les laisser disposer d’eux-mêmes, ont été abandonnés ou ont fait l’objet d’un laxisme incroyable. Il avait été notamment promis aux Jarawas que les interventions venant de l’extérieur allaient être réduites au maximum.

Le peuple Jarawa rejette aujourd’hui clairement notre monde, puisqu’il subit, entre autres, les effets négatifs du tourisme de masse. Une route a été construite en plein milieu de leur territoire composé essentiellement de forêts. Les autorités indiennes favorisent l’organisation d’un genre de safaris humains lors desquels les touristes prennent en photo les Jarawas et distribuent de la nourriture, malheureusement comme au zoo.

Une autre menace de taille affecte les Jarawas : le braconnage, surtout les braconniers eux-mêmes :

« Il y a des braconniers qui viennent avec des armes pour nous tirer dessus. Ils viennent pour nous voler. Ils cherchent à nous faire peur. Ils veulent nous acheter des cochons sauvages. Ils posent des pièges à cochons. Ils tuent tous nos cochons. Parfois, ils nous donnent un peu d’argent ou des habits. C’est comme ça qu’ils pillent notre gibier. Avant, on ne mangeait que des cochons. Mais il n’y en a presque plus. On a été obligé de chasser les daims pour manger. On ne sait plus quoi faire. On s’assoit et on réfléchit à tout ça. On y pense tout le temps » explique Outa, un second membre du peuple Jarawa.

Certains gardes forestiers de l’organisation gouvernementale en charge de la protection des Jarawas (AAJVS) sont complices, en plus de fermer les yeux sur la situation en général, d’une pratique méprisable : ils permettent aux braconniers d’obliger certains chasseurs Jarawas de collaborer avec eux. Les touristes et les braconniers, avec la complicité de certains gardes, se montrent également coupables d’une assimilation forcée de nos modes de vie envers les Jarawas, avec par exemple l’introduction de l’alcool et du tabac. Mais ce n’est pas tout, puisqu’il a été rapporté que certains touristes échangeraient de la nourriture (désormais manquante) contre des prestations d’ordre sexuelles.

Les Jarawas devraient être poussés à quitter leur territoire vers les villes, à cause de la faim, de la maltraitance ainsi que de la dégradation de leur milieu et de leurs ressources. Les reporters français Alexandre Dereims et Claire Beilvert ont lancé une pétition afin de contraindre le gouvernement indien à sanctuariser le lieu de vie des Jarawas et à faire respecter à la lettre une ordonnance de la cour suprême du pays datant de 2013 : fermer cette route néfaste traversant la forêt et donc leur territoire.

Voici un reportage élaboré par Vice, dénonçant les safaris humains organisés chez les Jarawas :

Sources : The TelegraphMr Mondialisation

Crédit photos : Claire Beilvert